25/01/2009
LES GENTILSHOMMES VERRIERS (2)
Le verre est obtenu par la fusion de 3 éléments : de la silice à 60 %, de la soude et de la chaux qui empêche la porosité du verre et qui lui donne du brillant. Des oxydes minéraux sont incorporés à la pâte pour obtenir des verres colorés : du fer pour la couleur verte, du cobalt pour le bleu, du manganèse pour le violet, du cuivre pour le rouge et de l'uranium pour le jaune. La présence d'oxyde de fer dans le sol du causse a donné son nom au village de Ferrières. Ce toponyme, fréquemment associé aux verreries, montre que l'implantation d'ateliers verriers était liée pour partie aux ressources locales. Pourtant, les pigments d'uranium et surtout de cobalt étaient importés de fort loin et étaient donc très onéreux.
Hormis la chaux qui est facilement obtenue à partir de la combustion du calcaire environnant, ni la silice ni la soude ne se trouvent dans le milieu naturel du Causse de l'Hortus. Il fallait donc faire venir ces composants à dos de mulets des régions avoisinantes. La silice était obtenue à partir de galets de quartz que l'on ramassaient dans les lits du Gardon mais surtout de l'Hérault distant d'une dizaine de kilomètres. Pour en extraire la silice, les galets étaient "étonnés", c'est à dire cuits à haute température puis plongés dans l'eau. La soude provenait de plantes sauvages poussant sur le littoral. La combustion de la salicorne et les diverses espèces de soude formaient une "brique" qui était généralement transportée par les marchands de verres lorsqu'ils venaient chercher leur livraison à la verrerie.
Avant le raffinage et le soufflage du verre, il était nécessaire d'effectuer une première fusion de la pâte dans un four spécial appelé "carcaise". Cette pâte, la fritte, était ensuite concassée puis mise à recuire dans des creusets jusqu'à 1 400 ° C.
Les maîtres souffleurs, aidés de "gamins", prélevaient dans les creusets une petite quantité de verre en fusion à l'aide de longues cannes et soufflaient une paraison après l'avoir égalisée sur une pierre plate faisant office de marbre. A la forme soufflée sont rajoutés des anses, pieds, bec verseur ainsi que des éléments décoratifs comme des gouttes, des filaments, des résilles qui constituent l'objet fini. Immédiatement après leur réalisation, les objets sont mis dans un four de recuissons où ils vont progressivement s'abaisser en température.
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24/01/2009
LES GENTILSHOMMES VERRIERS DU CAUSSE DE L'HORTUS (1)
Entre Pic Saint Loup et Séranne, le causse de l'Hortus, traversé par de sinueuses vallées argileuses aux allures de couleuvres alanguies, fut exploité de la fin du 13ème siècle jusqu'à la veille de la Révolution par la noble industrie des verreries forestières. Durant près de 5 siècles, cet aride plateau calcaire et son frère siamois, le causse de Pompignan, connurent une vingtaine de verreries dont les ateliers, itinérants pour la plupart, suivaient les coupes de bois qui alimentaient les fours. Cependant, au 18ème siècle, les administrations royales, alarmées par la destruction massive des forêts languedociennes, obtinrent après de longues résistances le déplacement des verreries vers l'Aigoual.
A l'image des asphodèles qui après l'incendie renaissent du clapas, le "Chemin des Verriers" rend hommage aux gentilshommes d'antan et ressuscite leur histoire en l'inscrivant résolument dans l'aventure des verriers contemporains.
L'art des verriers antiques s'est transmis dans l'occident médiéval par le truchement des monastères dans lesquels les moines issus de nobles familles étaient initiés à cet art. Tout en gardant jalousement leurs secrets, ces verriers s'établirent peu à peu à leur compte et essaimèrent dans les forêts du royaume. Charles VI accorde à cette caste d'importants privilèges qui sont définis en 1455 dans la Charte de la viguerie de Sommières. Celle-ci stipule qu'il est interdit d'enseigner l'art de la verrerie à des roturiers de même qu'à des nobles ne descendant pas d'une lignée de verriers. Ainsi, les dynasties des de la Roque, des Azémar, des Girard, des Faucon, s'allient au cours des siècles pour préserver les privilèges de leur rang.
Jusqu'à l'utilisation du charbon de terre, le bois reste la seule source d'énergie permettant la chauffe des fours. C'est pourquoi, pendant des siècles, les verriers recherchent continuellement de nouvelles forêts. Au cours du 14ème siècle, les populations refoulées par la guerre et la famine abandonnent les saltus à la forêt qui devient ainsi une immense réserve de combustible convoitée par les verriers. Ainsi, vers 1340, Guillaume Azémar installe une verrerie itilérante qui pourrait bien être celle de la Seube fouillée par N. Lambert durant la décennie 1960/1970.
Cette unité de production, hameau au coeur de la forêt, s'est ensuite déplacée sur le terroir de Beaumes où elle perdura jusqu'en 1746.
La verrerie de Couloubrine, implantée dans le vallon de Ferrières-les Verreries, est une possession de la famille de la Roque et fonctionne alternativement au 16ème et au 18ème siècle. Fouillée et restaurée sous la houlette de l'Office Départemental d'Action Culturelle, la verrerie de Couloubrine est actuellement un des maillons du "Chemin des Verriers". Cette bâtisse qui a des allures de maison forte laisse voir dans sa partie supérieure comme la dentelle d'une frise, les vestiges d'un pigeonnier. Les fours, dont les soles ont été mises à jour par les fouilles, étaient construits sur le flanc sud des bâtiments. Comme celui du forgeron, l'art du verre est un métier du feu, puissant et mystérieux qui, de la préparation des matières premières à la cuisson des objets soufflés, nécessite une succession de savoir-faire précis.
Durant la "reveillée", période de production allant d'octobre à juin les fours étaient continuellement en chauffe, alimentés et surveillés par le Maître Tiseur.
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11/01/2009
SAINT GILLES (suite)
L'épisode albigeois venant mettre un terme à la puissance politique des Comtes de Toulouse, Saint Gilles perdait déjà beaucoup. Mais la création du port d'Aigues Mortes lui porta un coup plus terrible encore. La cité qui avait connu les premiers notaires et comptait plus d'une centaine de banquiers et changeurs retourna à la ruralité et à l'artisanat. Les guerres de religion ne l'épargnèrent pas et Cavalier y commit de nombreuses exactions. Alors, lorsqu'on parcourt les rues autour de la maison romane aux superbes fenêtres, lorsqu'on est face à la Portes des Maréchaux - l'un des derniers vestiges des remparts - ou encore lorsqu'on visite le Musée Lapidaire, on ne peut avoir qu'une faible idée de ce que fut ce bourg qui ne compte aujourd'hui guère plus de 12 000 habitants. De nos jours, on y vit de petite industrie et surtout d'agriculture avec les vins, les vergers, la maraîchage et même le riz. Mais avec la proximité de la Camargue, le tourisme y est bien développé et l'important port fluvial rappelle ces temps où l'on voyait accoster les bateaux ventrus apportant les épices et autres denrées des pays lointains.
La maison du Pape
Chacun sait que le pape qui régna de 1265 à 1268 sous le nom de Clément IV avait un nom bien Camarguais : Gui Foulques. La Maison Romane, restaurée par Viollet-le-Duc serait selon la tradition la maison natale de ce célèbre Saint-Gillois qui, avant sa papauté, fut secrétaire de Saint Louis, servit sous les armes et fut même mari et père de famille...
Gilles d'Athènes
Saint Gilles serait venu d'Athènes en 663 jusque dans ce pays que les Romains appelaient "Vallis Flavinia". Menant une vie d'ermite, il fonda un petit monastère. Après sa mort, de nombreux miracles s'étant produits près de son tombeau, son culte se répandit et l'on vient en pélerinage sur ces lieux jusque d'Italie, de Pologne, d'Allemagne et du Danemark. La fête annuelle du saint, le 1er septembre, donna bientôt lieu à une grande foire dans cette cité qui s'appela un temps Saint Gilles sur Rhône.
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02/01/2009
L'ABBATIALE DE SAINT GILLES (Gard)
C'est autour d'une abbaye qui existait au VIème siècle que Saint Gilles s'est structurée.
Sur la tombe même du saint ermite où l'on venait en pélerinage, commença à s'ériger une église. L'oeuvre allait être magistrale et capitale mais sa construction commencée au IXè siècle connut des interruptions, si bien qu'il fallut attentre le début du XIVè siècle pour voir la nef enfin raccordée au transept.
Hélas, en 1574, les protestants maîtres de la place transformèrent l'église en forteresse et en 1622 commença avec le Duc de Rohan sa démolition systématique. Il ne subsista que la façade, le coeur et la crypte. Les reconstructions et restaurations ne donnèrent guère à l'abbatiale son aspect primitif, mais la façade aux trois portails inégaux est une des plus belles oeuvres de l'art roman qui puisse se voir de nos jours. On a coutume de dire que la façade est, avec celle de l'église de Tournus, l'une des plus belles de France. Deux formules du classicisme antique se retrouvent dans l'ordonnancement des portails : portique à colonnes et statues dans des niches. Les hauts reliefs et leurs thèmes sont aussi très significatifs. Passion et Résurrection sont dues au Maître Brunus et ses élèves et à celui que l'on nomme le Maître de Saint- Michel, venu plus tard. Malgré de nombreuses polémiques, on situe la période de réalisation vers 1140-1160. Il semble que le choix de thèmes forts ait été dicté pour lutter contre les "nouvelles idées", alors que le provençal Pierre de Bruys, précurseur de l'hérésie, avait été brûlé par la foule une décennie plus tôt en ces lieux.
Née de l'observation des monuments antiques, elle allait influencer bien d'autres réalisations de la façade méditerranéenne du pays. Toute proche est "La Vis", vestige de l'église originelle. Cet escalier hélicoïdal gironné est de si parfaite facture que tout compagnon faisant son tour de France se devait de la voir et beaucoup ont gravé là leur nom sur la pierre.
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