28/03/2009
LE VIGAN (3)
La soie apportera à la région une économie et un essor formidables.
Au milieu du XVIIème siècle, Monsieur de Camprieu va devenir consul. C'est lui, dit-on, qui développera en Cévennes la sériciculture et la filature. On veut aussi que Colbert ait favorisé cette industrie et que la première paire de bas de soie ait été fabriquée au Vigan par un certain Fleschière de Saint Laurent le Minier.
Mais en ce temps, l'existence n'est pas gaie pour tous. A l'heure où l'Edit de Nantes est révoqué (1685), 25 religionnaires de la ville sont mis au cachot, battus comme plâtre et doivent renier leur foi. D'autres émigrent, vers Genève surtout ... Il semble qu'on ait en ce temps le sang chaud au Vigan. On s'y bat en duel pour un oui, pour un non, on vide les différents à coups de pistolet, si bien que l'on finit par y interdire le port d'arme.
Le Vigan était un "pays prodigieux, un village où l'on vit comme à Paris, avec un vin de terroir aussi bon que le Bourgogne et des gens pleins d'esprit... " Un vrai jardin de Dieu ! C'est aussi l'époque où naît le plus célèvre des viganais : Louis d'Assas. A treize ans, c'était déjà "Le Chevalier". (Louis d'Assas entra tôt aux armées et se signala à plusieurs occasions. Son héroïque conduite à Clostercamp l'immortalisa. Parti en reconnaissance, il tombe dans les rangs ennemis et sommé de se taire face aux baïonnettes, il préfère mourir en donnant l'alerte avec la fameuse phrase : "Feu, Auvergne, ce sont les ennemis").
Aux veilles de la Révolution, l'agriculture viganaise est axée sur le châtaignier, les arbres fruitiers, la vigne et le mûrier. Les traversiers sont jalousement entretenus, les près sont irrigués.
Les bas de coton sont exportés vers l'Espagne. La tannerie et la tonnellerie ne chôment pas non plus et on extrait encore un peu de charbon.
Mais c'est le magnan, petit ver glouton de feuilles de mûrier, qui commence à faire sa place. Aulas, Sumène, Arre, Bez... Tous le pays viganais n'en finit pas de compter ses métiers et ses bas de soie : 12 000 paires par an ! L'Europe ne veut qu'eux... On en exporte jusqu'à St Petersbourg et aux Indes.
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15/03/2009
LE VIGAN ( 2 )
Le Prieur de l'abbaye était aussi seigneur du Vigan mais, avec la réunion du dioscèse de Nimes à la couronne, il perdit beaucoup de ses droits. En 1270, le Vigan est donc ville royale. Cela ne l'empêchera pas, même avec ses fortifications, d'être dévastée par les routiers de Seguin de Badefol près d'un siècle plus tard. Les temps sont troubles, mais une vie municipale structurée est établie dans le bourg.
La diversité est bien présente dans l'économie régionale. On pense que les grandes plantations de châtaigniers existaient dès le XIIè siècle. On élève des chèvres et des bêtes à laine, l'olivier et la vigne sont aussi présents.
Par ailleurs, des documents nous disent que des mines de charbon étaient exploitées à Cavaillac en 1324. Cela n'était d'ailleurs pas nouveau, puisqu'on sait qu'en 1128 les mineurs jouissaient d'exemptions d'impôts. Quant à la filature et le tissage, toute la région produit du drap grossier sur des métiers primitifs au début du XVème siècle. C'est d'abord une affaire familiale à laquelle sont employés femmes et enfants des villageois. Plus tard, apparaîtront les manufactures de drap, de cadis ou de serge et, à l'aube du XVIème siècle, les rivières étaient, dit-on, recouvertes de moulins à foulon. Mais la soie était aussi filée, bien modestement, en Cévennes vers 1340 et peut être avant, puisque le "trahale", antique métier pour la tisser, existait en 1220.
A l'heure des troubles religieux et de Rohan, le Vigan compte environ 3 000 âmes. Cinq foires y ont lieu dans l'année, ses draps se vendent dans tout le Midi, sont fournis aux troupes mais sont aussi exportés vers le Canada et le Levant. Et puis, la ville se fait une belle réputation dans la fabrication de chapeaux de laine. Des couvre-chef très prisés qui perdront pourtant de leur crédibilité lorsqu'ils seront confectionnés avec du poil de boeuf. Le drap va connaître aussi des déboires avec les nouvelles réglementations imposées par Colbert.
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01/02/2009
LES GENTILSHOMMES VERRIERS (3)
La production des verriers de l'Hortus au Moyen Age était une vaisselle luxueuse de grande qualité et d'une incroyable finesse : les coupelles, burettes, fioles, verres à tige ou gobelets découverts lors de fouilles locales ou dans les villes voisines montrent la variété et l'art accompli de ces maîtres verriers. Cette production était écoulée vers les grandes villes de la région, en particulier Montpellier où divers corps de métiers comme les distillateurs ou les apothicaires étaient de grands consommateurs de fioles. De même, les parfumeurs de la capitale languedocienne achetaient des flacons en quantité pour vendre leur fameuse Eau de la Reine de Hongrie. L'époque moderne est une alternance de périodes de difficultés et de périodes fastes pour l'industrie verrière. Les gentilshommes verriers, sensibles aux idées de la Réforme participent même à leur propagation en tenant souvent le rôle de prédicateur. Au début du 18ème siècle, ils furent durement touchés, à la fois par les répressions engagées par le pouvoir royal, mais aussi par la guerre des Camisards. C'est dans ce contexte de guerre civile que Beaumes fut partiellement détruite. Déjà au cours du 17 ème siècle, elles connurent de nouveaux soucis qui signèrent leur déclin au siècle suivant. En effet, Colbert alerté par la diminution du patrimoine forestier du royaume édicte un décret qui limite et réglemente l'utilisation des bois. Malgré plusieurs tentatives, l'application de ces lois reste lettre morte, car au 18 ème siècle grâce à une conjoncture économique favorable la production verrière de l'Hortus augmente. Pourtant, les décrets de 1723 puis de 1742 intiment l'ordre aux gentilshommes de déplacer leurs ateliers vers les montagnes plus boisées de l'Aigoual. Un véritable lobby, composé des verriers, des représentants de leur corporation et des grands propriétaires fonciers comme le Marquis de Roquefeuille ou le Marquis de la Fare, tente de s'opposer aux décisions du pouvoir central. Finalement, à la veille de la Révolution, Messieurs les verriers quittent le Causse pour ouvrir de nouveaux ateliers sur la montagne de la Séranne et dans la vallée de la Buèges où les forêts contiennent de grandes quantités de bois propres à leur art. Pourtant, ce déplacement marque la fin des verreries forestières qui ne se rélèvent pas des difficultés liées à l'enclavement de ces nouveaux sites et l'essor des verreries à charbon de terre leur donnent bientôt le coup de grâce.
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25/01/2009
LES GENTILSHOMMES VERRIERS (2)
Le verre est obtenu par la fusion de 3 éléments : de la silice à 60 %, de la soude et de la chaux qui empêche la porosité du verre et qui lui donne du brillant. Des oxydes minéraux sont incorporés à la pâte pour obtenir des verres colorés : du fer pour la couleur verte, du cobalt pour le bleu, du manganèse pour le violet, du cuivre pour le rouge et de l'uranium pour le jaune. La présence d'oxyde de fer dans le sol du causse a donné son nom au village de Ferrières. Ce toponyme, fréquemment associé aux verreries, montre que l'implantation d'ateliers verriers était liée pour partie aux ressources locales. Pourtant, les pigments d'uranium et surtout de cobalt étaient importés de fort loin et étaient donc très onéreux.
Hormis la chaux qui est facilement obtenue à partir de la combustion du calcaire environnant, ni la silice ni la soude ne se trouvent dans le milieu naturel du Causse de l'Hortus. Il fallait donc faire venir ces composants à dos de mulets des régions avoisinantes. La silice était obtenue à partir de galets de quartz que l'on ramassaient dans les lits du Gardon mais surtout de l'Hérault distant d'une dizaine de kilomètres. Pour en extraire la silice, les galets étaient "étonnés", c'est à dire cuits à haute température puis plongés dans l'eau. La soude provenait de plantes sauvages poussant sur le littoral. La combustion de la salicorne et les diverses espèces de soude formaient une "brique" qui était généralement transportée par les marchands de verres lorsqu'ils venaient chercher leur livraison à la verrerie.
Avant le raffinage et le soufflage du verre, il était nécessaire d'effectuer une première fusion de la pâte dans un four spécial appelé "carcaise". Cette pâte, la fritte, était ensuite concassée puis mise à recuire dans des creusets jusqu'à 1 400 ° C.
Les maîtres souffleurs, aidés de "gamins", prélevaient dans les creusets une petite quantité de verre en fusion à l'aide de longues cannes et soufflaient une paraison après l'avoir égalisée sur une pierre plate faisant office de marbre. A la forme soufflée sont rajoutés des anses, pieds, bec verseur ainsi que des éléments décoratifs comme des gouttes, des filaments, des résilles qui constituent l'objet fini. Immédiatement après leur réalisation, les objets sont mis dans un four de recuissons où ils vont progressivement s'abaisser en température.
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24/01/2009
LES GENTILSHOMMES VERRIERS DU CAUSSE DE L'HORTUS (1)
Entre Pic Saint Loup et Séranne, le causse de l'Hortus, traversé par de sinueuses vallées argileuses aux allures de couleuvres alanguies, fut exploité de la fin du 13ème siècle jusqu'à la veille de la Révolution par la noble industrie des verreries forestières. Durant près de 5 siècles, cet aride plateau calcaire et son frère siamois, le causse de Pompignan, connurent une vingtaine de verreries dont les ateliers, itinérants pour la plupart, suivaient les coupes de bois qui alimentaient les fours. Cependant, au 18ème siècle, les administrations royales, alarmées par la destruction massive des forêts languedociennes, obtinrent après de longues résistances le déplacement des verreries vers l'Aigoual.
A l'image des asphodèles qui après l'incendie renaissent du clapas, le "Chemin des Verriers" rend hommage aux gentilshommes d'antan et ressuscite leur histoire en l'inscrivant résolument dans l'aventure des verriers contemporains.
L'art des verriers antiques s'est transmis dans l'occident médiéval par le truchement des monastères dans lesquels les moines issus de nobles familles étaient initiés à cet art. Tout en gardant jalousement leurs secrets, ces verriers s'établirent peu à peu à leur compte et essaimèrent dans les forêts du royaume. Charles VI accorde à cette caste d'importants privilèges qui sont définis en 1455 dans la Charte de la viguerie de Sommières. Celle-ci stipule qu'il est interdit d'enseigner l'art de la verrerie à des roturiers de même qu'à des nobles ne descendant pas d'une lignée de verriers. Ainsi, les dynasties des de la Roque, des Azémar, des Girard, des Faucon, s'allient au cours des siècles pour préserver les privilèges de leur rang.
Jusqu'à l'utilisation du charbon de terre, le bois reste la seule source d'énergie permettant la chauffe des fours. C'est pourquoi, pendant des siècles, les verriers recherchent continuellement de nouvelles forêts. Au cours du 14ème siècle, les populations refoulées par la guerre et la famine abandonnent les saltus à la forêt qui devient ainsi une immense réserve de combustible convoitée par les verriers. Ainsi, vers 1340, Guillaume Azémar installe une verrerie itilérante qui pourrait bien être celle de la Seube fouillée par N. Lambert durant la décennie 1960/1970.
Cette unité de production, hameau au coeur de la forêt, s'est ensuite déplacée sur le terroir de Beaumes où elle perdura jusqu'en 1746.
La verrerie de Couloubrine, implantée dans le vallon de Ferrières-les Verreries, est une possession de la famille de la Roque et fonctionne alternativement au 16ème et au 18ème siècle. Fouillée et restaurée sous la houlette de l'Office Départemental d'Action Culturelle, la verrerie de Couloubrine est actuellement un des maillons du "Chemin des Verriers". Cette bâtisse qui a des allures de maison forte laisse voir dans sa partie supérieure comme la dentelle d'une frise, les vestiges d'un pigeonnier. Les fours, dont les soles ont été mises à jour par les fouilles, étaient construits sur le flanc sud des bâtiments. Comme celui du forgeron, l'art du verre est un métier du feu, puissant et mystérieux qui, de la préparation des matières premières à la cuisson des objets soufflés, nécessite une succession de savoir-faire précis.
Durant la "reveillée", période de production allant d'octobre à juin les fours étaient continuellement en chauffe, alimentés et surveillés par le Maître Tiseur.
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11/01/2009
SAINT GILLES (suite)
L'épisode albigeois venant mettre un terme à la puissance politique des Comtes de Toulouse, Saint Gilles perdait déjà beaucoup. Mais la création du port d'Aigues Mortes lui porta un coup plus terrible encore. La cité qui avait connu les premiers notaires et comptait plus d'une centaine de banquiers et changeurs retourna à la ruralité et à l'artisanat. Les guerres de religion ne l'épargnèrent pas et Cavalier y commit de nombreuses exactions. Alors, lorsqu'on parcourt les rues autour de la maison romane aux superbes fenêtres, lorsqu'on est face à la Portes des Maréchaux - l'un des derniers vestiges des remparts - ou encore lorsqu'on visite le Musée Lapidaire, on ne peut avoir qu'une faible idée de ce que fut ce bourg qui ne compte aujourd'hui guère plus de 12 000 habitants. De nos jours, on y vit de petite industrie et surtout d'agriculture avec les vins, les vergers, la maraîchage et même le riz. Mais avec la proximité de la Camargue, le tourisme y est bien développé et l'important port fluvial rappelle ces temps où l'on voyait accoster les bateaux ventrus apportant les épices et autres denrées des pays lointains.
La maison du Pape
Chacun sait que le pape qui régna de 1265 à 1268 sous le nom de Clément IV avait un nom bien Camarguais : Gui Foulques. La Maison Romane, restaurée par Viollet-le-Duc serait selon la tradition la maison natale de ce célèbre Saint-Gillois qui, avant sa papauté, fut secrétaire de Saint Louis, servit sous les armes et fut même mari et père de famille...
Gilles d'Athènes
Saint Gilles serait venu d'Athènes en 663 jusque dans ce pays que les Romains appelaient "Vallis Flavinia". Menant une vie d'ermite, il fonda un petit monastère. Après sa mort, de nombreux miracles s'étant produits près de son tombeau, son culte se répandit et l'on vient en pélerinage sur ces lieux jusque d'Italie, de Pologne, d'Allemagne et du Danemark. La fête annuelle du saint, le 1er septembre, donna bientôt lieu à une grande foire dans cette cité qui s'appela un temps Saint Gilles sur Rhône.
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02/01/2009
L'ABBATIALE DE SAINT GILLES (Gard)
C'est autour d'une abbaye qui existait au VIème siècle que Saint Gilles s'est structurée.
Sur la tombe même du saint ermite où l'on venait en pélerinage, commença à s'ériger une église. L'oeuvre allait être magistrale et capitale mais sa construction commencée au IXè siècle connut des interruptions, si bien qu'il fallut attentre le début du XIVè siècle pour voir la nef enfin raccordée au transept.
Hélas, en 1574, les protestants maîtres de la place transformèrent l'église en forteresse et en 1622 commença avec le Duc de Rohan sa démolition systématique. Il ne subsista que la façade, le coeur et la crypte. Les reconstructions et restaurations ne donnèrent guère à l'abbatiale son aspect primitif, mais la façade aux trois portails inégaux est une des plus belles oeuvres de l'art roman qui puisse se voir de nos jours. On a coutume de dire que la façade est, avec celle de l'église de Tournus, l'une des plus belles de France. Deux formules du classicisme antique se retrouvent dans l'ordonnancement des portails : portique à colonnes et statues dans des niches. Les hauts reliefs et leurs thèmes sont aussi très significatifs. Passion et Résurrection sont dues au Maître Brunus et ses élèves et à celui que l'on nomme le Maître de Saint- Michel, venu plus tard. Malgré de nombreuses polémiques, on situe la période de réalisation vers 1140-1160. Il semble que le choix de thèmes forts ait été dicté pour lutter contre les "nouvelles idées", alors que le provençal Pierre de Bruys, précurseur de l'hérésie, avait été brûlé par la foule une décennie plus tôt en ces lieux.
Née de l'observation des monuments antiques, elle allait influencer bien d'autres réalisations de la façade méditerranéenne du pays. Toute proche est "La Vis", vestige de l'église originelle. Cet escalier hélicoïdal gironné est de si parfaite facture que tout compagnon faisant son tour de France se devait de la voir et beaucoup ont gravé là leur nom sur la pierre.
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28/12/2008
AIGUES MORTES, UNE VILLE DE ROI (2)
Ville marchande autant que militaire et surtout véritable entrepôt international, Aigues Mortes tiendra une importante place jusqu'au début du XIVè siècle.
Le sel, les étoffes, les épices, les céréales paieront les murs et nourriront les habitants. Puis les ensablements successifs et coûteux, les razzias barbaresques et autres coups du sort auront raison de sa prospérité avant que le port marseillais, devenu français en 1481, ne lui porte l'estocade finale.
On aura beau rapporcher le port de la ville, creuser un chenal plus rapide que le Canal Viel, rien n'y fera. Jacques Coeur n'aura là le mouillage de ses nefs qu'une brève période et les marchands italiens revenus n'y resteront pas.
D'autant plus que les grandes épidémies trouvent dans les palus un terrain de prédilection. Enfin, les Guerres de Religion rendront peu sûre la contrée...
Pourtant, en juillet 1538, la cité royale renoue avec l'accueil des souverains : Charles Quint et François 1er y signent un traité de paix.
Restant la ville du sel, Aigues Mortes sera aussi une place de sécurité pour les calvinistes. Ils y ont la Tour Carbonnière et le Fort de Peccai outre la charge de la ville ... Jusqu'à ce que Louis XIII vienne l'assiéger en 1622... On connaît la suite, la révocation de l'Edit de Nantes, l'évasion de Mazel, l'histoire de Marie Durand et le "résister" gravé sur la margelle du puits du cachot .. Oubliée !
Dès lors, il peut sembler que l'histoire d'Aigues Mortes se résume à celle de sa tour-prison. Pourtant, l'histoire tout court laissera ici quelques péripéties piquantes et quelques victimes avec la Révolution et ses suites. A plusieurs reprises, on tente de réhabiliter le port avec parfois un bref succès, on rectifie le chenal maritime du Grau du Roi en 1845 ... Mais le chemin de fer gagnera définitivement la partie. Quelques écrivains de passage s'extasient sur les remparts dont Chateaubriand en 1838.. D'autres voient lentement mourir ... "Au bord d'une eau stationnaire, Aigues Mortes aux vingt tours, la ville poitrinaire..."
C'est un lieu que l'on oublie ... que l'on dit maudit et hors de tout car on y massacre même de pauvres ouvriers italiens le 16 août 1893. Mais elle n'en est pas moins devenue cité agricole et son destin s'est définitivement lié à la production du sel. Aujourd'hui, c'est tout au long de l'année que les touristes visitent la ville où, immortalisé par Pradier, Saint Louis est debout sous les platanes de la place. Pas très loin sont tous les hauts lieux qui racontent le cours du temps : Notre Dame des Sablons qui n'était pas encore achevée lorsque le roi s'y recueillit avant son départ pour la 7ème croisade, les chapelles des pénitents blancs et gris, l'ancien couvent des Capucins, l'hôtel du Gouverneur et tout cela gardé par les remparts, les tours, les créneaux .. Et puis la formidable présence de cette forteresse au beau nom de Constance.
Quelques chiffres : l'enceinte développe environ 1 600 m de remparts sur une hauteur de 7 à 11 m et pour une épaisseur à la base de 3 m. Elle est flanquée de 15 tours construites sur des plans différents, tours d'angle, tours jumelles... On y accède par 16 escaliers. La Tour de Constance dépasse les 34 m de hauteur et le phare qui la domine y rajoute ses 17 m. Son diamètre extérieur est de 22 m et ses murs ont une épaisseur de 6 m.
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27/12/2008
AIGUES MORTES, UNE VILLE DE ROI (1)
Un Roi de France désirait un port sur la Méditerranée et surtout un port indépendant des puissances financières et commerciales de l'époque. Saint Gilles était trop à l'intérieur des terres, Sète ne naîtra qu'après 1660, d'autres sites sont écartés... Voilà Louis IX troquant avec les moines de Psalmody le petit havre contre une terre au pied des murs de Sommières.
On n'attendra pas la rédaction des actes officiels pour commencer les travaux de la ville et surtout les aménagements du port. Il semble en fait que ce port se trouvait dans l'actuel Etang de la Ville et ne pouvait accueillir que des bâtiments de faible tirant d'eau. Ainsi, lorsque Saint Louis s'y embarqua pour la croisade en 1248, il dut d'abord traverser l'Etang de La Marette et suivre ensuite le Canal Viel pour arriver enfin au Grau Louis, près de l'actuel Boucanet. Là, au large, attendaient les navires de haut-bord. Le port d'Aigues Mortes était loin d'être une rade et pourtant une croisade plus modeste, celle de Thibaut IV, y avait vu son point de départ en 1239.
La forteresse et sa tour s'achevèrent après le départ du roi Louis, mais la ville était à peine terminée et toujours sans enceinte lorsqu'il s'y embarqua à nouveau le 3 juillet 1270 avec 60 000 croisés. Son fils et successeur, Philippe le Hardi, en conclut la construction deux ans plus tard, avec l'entrepreneur Boccanégra. A la mort de cet Italien, le travail fut un temps arrêté mais se termina toutefois avec le siècle.
Le grand quadrilatère et ses tours restent le type même de l'architecture militaire de ces temps : avec des influences arabes puisqu'on dit qu'il a été calqué sur les plans de Damiette.
Certains veulent que ses pierres à bossages soient venues de Beaucaire par le Rhône. Sans doute leur bel aspect convenait-il à des lieux qui se voulaient résidence royale. Pourtant, dès 1307, c'est en prison qu'allait se convertir la Tour de Constance : d'abord pour 45 templiers qui devaient périr un peu plus tard sur les bûchers d'Alès... Des princes royaux y furent aussi incarcérés pour haute trahison, puis des magistrats catholiques, des femmes et des hommes protestants et même, après Waterloo, les officiers de la garnison de la ville surprise par les troupes royales.
Quant à la tour d'angle du sud ouest, elle servit de charnier après la honteuse reddition de Louis de Malepue et la reprise de la ville à ces Bourguignons que l'on sala à l'intérieur comme de vulgaires jambons, au début de l'année 1421. Il en reste l'immortelle histoire et le petit refrain : Bourguignon salé, L'épée de côté, La barbe au menton ... Saute Bourguignon.
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21/12/2008
LE LUNELLOIS (4)
Un des plus sanglants épisodes des guerres de religion eut pour théatre Saint Sériès et Saturargues, 18 ans après la révocation de l'Edit de Nantes, le 20 septembre 1703. Ce jour là, vers 10 heures du soir, les Camisards qui avaient pour complice le meunier de Saint Christol passent la Roque d'Aubais, massacrent onze personnes dans le premier de ces villages et soixante dans le second. Les maisons, le château et l'église sont brûlés. Les survivants se réfugient à Lunel qui, du coup, va se doter d'un nouveau rempart. Saturargues sera déserté pendant plusieurs années.
Entre temps, les "Villettes" ont été vendues mais leur vente a été cassée. Cependant, Lansargues a été rachetée par ses habitants, et ce au profit du roi. Lunel a vu aussi la construction de sa caserne, la réfection de son église et vécu d'autres péripéties.
Que voir en Lunellois ?
Tout d'abord : en ville, dans le centre avec les Caladons, les rues étroites, l'Hôtel de Bernis (vestiges de l'école juive) et quelques belles demeures retient l'attention. L'église abrite un orgue de Cavaillé Coll et la bibliothèque possède des joyaux. Sur le plateau, les après-midi de pétanque et les marchés du jeudi et du dimanche sont riches de couleurs, d'accent et de bonnes affaires. Et juste à côté sont les fraîches allées du parc conçues selon Le Nôtre. Quant aux Arènes, dès que vient la belle saison...
La garrigue lunelloise est un merveilleux lieu de promenade et de découverte : sur les bords du Vidourle, de Saint Jean de Nosé à La Jassette proche du Pont d'Ambrussum, ou du côté de Saturargues, de la Coste ou du Grès Saint Paul.
Le Mas des Caves est reconnaissable de loin avec sa curieuse construction tout en haut du coteau. Ce fut la demeure de l'Abbé Bousquet qui, vers 1750, produisait le meilleur des muscats. Plus loin c'est le hameau disparu que l'on nommait Montels et dont une seule croix marque l'emplacement. Juste au-dessus, La Tour de Farges à d'autres histoires à conter. Savez-vous qu'elle a connu Courbet, Michelet, Karl Marx, au temps de François Sabatier d'Espeyran et de la cantatrice Caroline Unghet, son épouse ?
Descendez au village : sa mairie n'est ni plus ni moins qu'un château dont l'orangerie" est une merveille. J. J. Durand, maire conventionnel de Montpellier et guillotiné en 1794 en fut propriétaire.
Lansargues possède une église classée et, comme les autres communes jouxtant l'Etang de l'Or, des marais où paissent plusieurs manades de taureaux.
Poussez jusqu'à La Grande Motte, car elle est bel et bien en Lunellois. Les planches à voile, le golf, le port et le béton des clairs immeubles ne doivent surtout pas nous faire oublier les pins ; ces pins qui jadis recouvraient tout le littoral et que l'on a replanté aux pieds des pyramides.
Et puis finissons la balade à Marsillargues, mais en passant par la "Route des Mas". Elle longe un instant l'ancien lit du Vidourle. C'est là un vrai pays avec des domaines en guise de villages. Marsillargues est au bout, avec sa ceinture de platanes, ses arènes à l'ombre du clocher et son château chargé d'histoire où tant de choses sont admirables. La salle de billard, la fontaine, les plafonds... Savez-vous qu'on y découvre le porc-épic, emblème de Louis XII, la salamandre de François 1er et le croissant de lune de Diane de Poitiers ?
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