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09/05/2009

LE CAUSSE DE BLANDAS

causse paysage.jpgDu haut de ses 1366 mètres, le Saint Guiral, petit frère de l'Aigoual, domine Alzon où la Vis roule encore ses eaux avant de jouer les cachottières... Puis au-dessous, tout change. Le Causse de Blandas ouvre là son rigoureux domaine. Mais qui donc vous dit qu'il ne possède pas aussi ses charmes...

Pour rendre très naturelles et faciles les choses, laissons à la Vis le soin de cerner le Causse de Blandas. La Vis, c'est cette rivière qui naît dans le Saint Guiral. Si l'on en croit la légende, le Saint Guiral, le Pic Saint Loup et le Roc de Nant furent choisis comme lieux du dernier hermitage par les trois frères d'Esparon amoureux de la belle Irène, la châtelaine de Rogues.

Au sud d'Alzon, la Vis a donc le causse du Larzac à sa droite et celui de Blandas sur son autre rive. Puis à Vissec, alors qu'elle n'est plus qu'un blanc serpent de cailloux tout au fond de son canyon, elle oblique à gauche vers Navacelles avant de remonter vers le Massif du Saint Bresson. C'est alors qu'elle sert de frontière à la Montagne de la Seranne et qu'ayant retrouvé ses eaux, elle scintille au fond de ses sauvages gorges.

St guiral.jpgAvec au nord l'Arre qui s'en va chatoyer sous le pont de Vigan, voilà défini le périmètre du causse de Blandas.

A Alzon, la Vis flirte avec d'étroits jardins où le dahlia et la raïolette cohabitent sous quelques vieux pommiers à reinettes. Plus bas, le pont du Saurel la voit toujours sous ses arches et cela depuis le douzième siècle. Au lieu-dit Le Moulin de Larcy, l'eau se perd et continue son cours sous la terre, dans un mystérieux et important réseau de fissures que les savants nomment des diaclases.

C'est auprès d'un autre moulin ruiné, le moulin de la Foux, que la Vis retrouve son cours de surface pour aussitôt rafraîchir le fond vert de l'écrin du cirque de Navacelles. Mais, entre temps, du côté de Vissec, la Virenque est venu la rejoindre. Nées du même massif et tout aussi cachottières depuis Sauclières, ses eaux retrouvent pareillement le soleil au moulin de la Foux. Le sable de son lit asséché recèle des paillettes d'or...

moulin de la foux la vis.jpgPlateau d'une dizaine de milliers d'hectares, le causse de Blandas n'est qu'une partie du Larzac. Mais comme dans du gâteau, la lente érosion de la Vis l'a littéralement tranché dans le calcaire tendre, perméable et fissuré. Le blanc des zones ingrates le caractérise sur les cartes et l'impression d'âpreté, de sauvagerie et de vide est permanente au milieu de sa végétation rase et rousse. Ici, le buis, l'églantier ou le poirier sauvage font figures de géants au milieu de la pierraille, que celle-ci soit éboulis bleuté, moignon affleurant, pan de massif ou encore clapas et murs lentement édifiés avec le roc extrait lors de la mise en culture.

L'homme a élu domicile sur le causse depuis des millénaires et maints vestiges l'attestent. Le nombre de dolmens, menhirs et cromlechs est surprenant sur un site aussi peu étendu. L'ensemble de pierres levées de Peyrarines ou celui de Mercouline, près de la Rigalderie sont là depuis quatre mille ans ou plus... A Rogues, l'oppidum témoigne toujours, tout comme les menhirs de la Trivale ou, plus haut, celui d'Avernat, du côté du Quintanel. Mais avec la sédentarisation, l'agriculture et l'élevage, voilà environ sept millénaires, l'homme a profondément modifié ce pays. La déforestation, l'écobuage, le pâturage intensif ont eu raison de la forêt initiale où le chêne, le frêne et le hêtre se taillaient la part belle auprès de quelques résineux. L'érosion a fait le reste et la flore a vu progresser d'autres espèces.

L'homme n'a pourtant pas délaissé le plateau et s'est agrippé plutôt qu'épaulé à une économie basée sur l'élevage et la production étriquée de quelques légumineuses dans les dolines et autres dépressions relativement généreuses. Cela a duré pratiquement jusqu'au milieu du XXème siècle, tandis que de petits artisanats et industries venaient apporter de supplémentaires subsides : travail du bois de buis, ceuillette de plantes médicinales, travaux de bonneterie à domicile...

Megalites _CausseBlandas.jpg

02/05/2009

LES CHEVRES DE CAMPIS

vers campis.jpgCampis, village ou plutôt hameau haut perché, accroché à flanc de vallon, quelle est donc ton histoire ?

Quelques cerisiers se découvrent parmi les arbres les plus caractéristiques des Cévennes. Campis a connu des époques sans doute plus fastes et les massives maisons nous le disent. Une centaine d'âmes vivaient là jadis. Puis on est tombé à 20, à 10, à 3 habitants.

Aujourd'hui, avec 7 familles on est en pleine augmentation. On y compte même des anglais.

Il existait jadis de nombreuses races de chèvres dont une souche locale cévenole aujourd'hui disparue.

chèvres.jpgLe canton du Vigan compte aujourd'hui une vingtaine d'éleveurs de caprins. Mais la moyenne d'un troupeau est de 40 bêtes. Au printemps, les chèvres sont dans les prés, profitant de la pousse d'herbe, puis lorsque arrive la saison plus sèche, vers mai-juin, elle vont brouter dans les bois et les broussailles qu'elles affectionnent particulièrement. Avec juillet-août, vient le moment le plus difficile pour les nourrir, mais c'est ensuite la repousse d'herbe automnale et, dans les bois, la présence des glands et des châtaignes. Puis, en novembre-décembre intervient le tarissement et les mises à bas se font en janvier. Alors les chèvres ne sortent plus. Les chevreaux, nourris sous la mère, sont vendus lorsqu'ils atteignent environ 10 kg tandis que certaines chevrettes restent pour le renouvellement des troupeaux. C'est surtout la gestion des ressources qu'offre le terroir et qui sont différentes d'une saison à l'autre et qui est le vrai savoir-faire. Tous les éleveurs transforment et vendent eux-mêmes leur production, ce qui leur vaut le titre de "producteurs-fermiers". Le pélardon est commercialisé en circuit court, surtout sur la région méditerranéenne, mais aussi sur Lyon, Paris, Toulouse, chez les crémiers. Désormais, l'élevage caprin est reconnu comme un secteur économique important, mais qui doit rester sur des exploitations à caractère humain. Le travail spécifique de la laiterie fromagerie qui s'articule autour de 2 traites quotidiennes vient bien sûr de l'artisanat, malgré l'équipement digne d'un laboratoire. Les fromages sont moulés à la louche, sans pré égouttage, puis sont séchés et affinés dans des installations modernes avec de rigoureuses conditions d'hygiène. Une centaine de chèvres, cela représente un total annuel de 80 000 de ces petits fromages qui ont un attrait peu commun pour le gastronome. Ils sont appréciés mi-secs, crémeux, secs ou encore affinés.

campis.jpgRetournons avec les chèvres. Elles accompagnent l'homme depuis très longtemps et, si l'on veut faire une comparaison, on peut dire que si le mouton est obéissant et en ce sens proche du chien, la chèvre est espiègle, capricieuse et indépendante, elle tient plutôt du chat. Elles sont aussi très exigeantes en affection et ont vraiment besoin de la présence de l'homme. Certaines ont des noms à l'appel duquel elles réagissent. Grâce à elles, un pays retrouve une âme et une activité qui s'étaient peu à peu effacées. Les producteurs fermiers sont désormais considérés comme des acteurs importants dans l'aménagement du territoire.

19/04/2009

LA LEGENDE DU ROCHER

pont le vigan.jpgIl existe au Vigan un lieu-dit "Le Rocher de la Mère" dont le nom est lié à une émouvante histoire.

Napoléon avait alors sans cesse besoin de soldats et une bonne vieille du Vigan, la mère Bourdier, avait eu deux fils tués dans ses campagnes. Son dernier, Henri, sur qui elle avait reporté toute son affection, d'abord exempté à cause de sa petite taille, dut partir aussi en 1813.

Vaillant, héroïque même, il obtint de l'empereur son congé et avertit aussitôt sa mère de son retour, lui donnant rendez-vous près du rocher où ils s'étaient séparés.

Hélas, le soldat fut tué avant son départ et sa mère, n'en sachant rien, allait chaque jour l'attendre en vain. Jusqu'au jour où on la trouva sans vie près du fameux rocher...

07/04/2009

LE VIGAN (5)

pont en surplomb le vigan.jpgAprès le premier conflit mondial, la bonneterie industrielle s'installe au Vigan, mais la concurrence est grande et l'activité se restreint.

L'heure de la Rayonne, puis celle du Nylon vont sonner... Pauvre petite chenille ! A la veille de la seconde guerre mondiale, le nombre de sériciculteurs a fondu. Sans le mûrier (qu'une loi de 1941 interdira d'arracher), l'agriculture abandonnera aussi les traversiers. Villages, hameaux et fermes connaîtront l'exode, voire l'abandon ... A Saint Jean du Gard, Maison Rouge, la dernière filature française de soie fermera ses portes en 1965.

Ce n'est pas tout ! Les maladies ravagent la châtaigneraie et les mines ferment... Et dans sa préface à l'ouvrage de Pierre Gorlier, André Chamson écrit alors : "Quand j'avais dix ans, notre vieille cité des bords de l'Arre comptait dans les cinq mille âmes... Aujourd'hui, elle en compte à peine quatre mille".

Aujourd'hui, le Vigan rassemble 4 500 habitants. Mais si l'on considère d'autres chiffres, ce sont près de 40 000 visiteurs annuels que reçoit la Maison de Pays du Vigan. Véritable vitrine de la région, point de repère et de conseils pour le visiteur, elle est aussi un outil de travail et de promotion efficace. On y découvre les productions de l'agriculture régionale, le pélardon, la confiture, les fruits, la raîolette... mais aussi celle des usines de bonneterie qui restent un secteur important de l'économie.

04/04/2009

LE VIGAN (4)

le vigan 1.jpgEt voila que les troubles de la révolution viennent contrarier cela. On incendie les châteaux et en 1801 on exécute "Sans Peur", alias de Sollier, chef agitateur royaliste et chanoine qui disait la messe avec ses pistolets près de lui. Le résultat est qu'en 1840 la production de bas n'est plus que de 4 000 paires. Mais avec la vapeur, la filature atteint à nouveau des sommets. Le mûrier dore alors tout autant l'économie que la campagne en automne. Si on file dans la région du Vigan des dizaines de milliers de kg de cocons chaque année, c'est encore parfois la fermière qui, sous ses vêtements, réchauffe "la graine" dans un sachet pour en accélérer l'éclosion. On travaillera aussi la schappe, c'est-à-dire les déchets de soie.

En 1852, des maladies inconnues ravagent les magnaneries et Pasteur, venu à Alès, en découvre les causes. La reprise s'effectue : les fermes s'élèvent d'un étage supplémentaire et les hautes magnaneries aux multiples cheminées dressent leur architecture caractéristique. Mais le canal de Suez est percé... Les soies asiatiques deviennent un danger qui conduira au déclin la sériciculture cévenole. Le Vigan connaîtra une baisse de population, ce qui n'empêchera pas d'inaugurer la statue du sergent Triaire et la ligne de chemin de fer de Tournemire. Par contre, le collège sera supprimé en 1881.

28/03/2009

LE VIGAN (3)

l'arre.pngLa soie apportera à la région une économie et un essor formidables.

Au milieu du XVIIème siècle, Monsieur de Camprieu va devenir consul. C'est lui, dit-on, qui développera en Cévennes la sériciculture et la filature. On veut aussi que Colbert ait favorisé cette industrie et que la première paire de bas de soie ait été fabriquée au Vigan par un certain Fleschière de Saint Laurent le Minier.

Mais en ce temps, l'existence n'est pas gaie pour tous. A l'heure où l'Edit de Nantes est révoqué (1685), 25 religionnaires de la ville sont mis au cachot, battus comme plâtre et doivent renier leur foi. D'autres émigrent, vers Genève surtout ... Il semble qu'on ait en ce temps le sang chaud au Vigan. On s'y bat en duel pour un oui, pour un non, on vide les différents à coups de pistolet, si bien que l'on finit par y interdire le port d'arme.

Le Vigan était un "pays prodigieux, un village où l'on vit comme à Paris, avec un vin de terroir aussi bon que le Bourgogne et des gens pleins d'esprit... " Un vrai jardin de Dieu ! C'est aussi l'époque où naît le plus célèvre des viganais : Louis d'Assas. A treize ans, c'était déjà "Le Chevalier". (Louis d'Assas entra tôt aux armées et se signala à plusieurs occasions. Son héroïque conduite à Clostercamp l'immortalisa. Parti en reconnaissance, il tombe dans les rangs ennemis et sommé de se taire face aux baïonnettes, il préfère mourir en donnant l'alerte avec la fameuse phrase : "Feu, Auvergne, ce sont les ennemis").

Aux veilles de la Révolution, l'agriculture viganaise est axée sur le châtaignier, les arbres fruitiers, la vigne et le mûrier. Les traversiers sont jalousement entretenus, les près sont irrigués.

Les bas de coton sont exportés vers l'Espagne. La tannerie et la tonnellerie ne chôment pas non plus et on extrait encore un peu de charbon.

Mais c'est le magnan, petit ver glouton de feuilles de mûrier, qui commence à faire sa place. Aulas, Sumène, Arre, Bez... Tous le pays viganais n'en finit pas de compter ses métiers et ses bas de soie : 12 000 paires par an ! L'Europe ne veut qu'eux... On en exporte jusqu'à St Petersbourg et aux Indes.

15/03/2009

LE VIGAN ( 2 )

Le Prieur de l'abbaye était aussi seigneur du Vigan mais, avec la réunion du dioscèse de Nimes à la couronne, il perdit beaucoup de ses droits. En 1270, le Vigan est donc ville royale. Cela ne l'empêchera pas, même avec ses fortifications, d'être dévastée par les routiers de Seguin de Badefol près d'un siècle plus tard. Les temps sont troubles, mais une vie municipale structurée est établie dans le bourg.

La diversité est bien présente dans l'économie régionale. On pense que les grandes plantations de châtaigniers existaient dès le XIIè siècle. On élève des chèvres et des bêtes à laine, l'olivier et la vigne sont aussi présents.

Par ailleurs, des documents nous disent que des mines de charbon étaient exploitées à Cavaillac en 1324. Cela n'était d'ailleurs pas nouveau, puisqu'on sait qu'en 1128 les mineurs jouissaient d'exemptions d'impôts. Quant à la filature et le tissage, toute la région produit du drap grossier sur des métiers primitifs au début du XVème siècle. C'est d'abord une affaire familiale à laquelle sont employés femmes et enfants des villageois. Plus tard, apparaîtront les manufactures de drap, de cadis ou de serge et, à l'aube du XVIème siècle, les rivières étaient, dit-on, recouvertes de moulins à foulon. Mais la soie était aussi filée, bien modestement, en Cévennes vers 1340 et peut être avant, puisque le "trahale", antique métier pour la tisser, existait en 1220.

A l'heure des troubles religieux et de Rohan, le Vigan compte environ 3 000 âmes. Cinq foires y ont lieu dans l'année, ses draps se vendent dans tout le Midi, sont fournis aux troupes mais sont aussi exportés vers le Canada et le Levant. Et puis, la ville se fait une belle réputation dans la fabrication de chapeaux de laine. Des couvre-chef très prisés qui perdront pourtant de leur crédibilité lorsqu'ils seront confectionnés avec du poil de boeuf. Le drap va connaître aussi des déboires avec les nouvelles réglementations imposées par Colbert.

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16/02/2009

LE VIGAN (1)

le pont du vigan.jpgLe Vigan lézarde au pied du massif de l'Aigoual sous l'influence du géant des Cévennes et des eaux de la Souls et Coudoulous qui viennent rejoindre l'Arre venue d'Alzon.

Les "griffouls" des fontaines qui rafraîchissent la place du Quai doivent leur débit à la source d'Isis qui était le lieu de baignades estivales pour nymphes nimoises du temps de Pline.

Les origines du Vigan sont incertaines : l'occupation des sols de la région fut bien réelle à des époques fort reculées comme le néolithique. La source d'Isis compta beaucoup pour Le Vigan qu'il s'agisse d'adduction d'eau potable ou d'arrosage des cultures. On en retrouva l'importance tout au long des siècles. Par exemple, lorsqu'il s'agit de sa donation, en 1069, au Prieuré Saint Pierre par le seigneur d'Avèze ou, par la suite, avec les charges de fontainier et de "griffoulier" commis à l'entretien de la source, du canal et des fontaines.

fontaine le vigan.jpgLes minerais divers et les paillettes d'or des torrents retinrent les romains qui se firent aussi défricheurs et paysans. Puis, après les invasions barbares, le pays fut érigé en diocèse mais la légende veut que l'ancienne cité du Vigan ait été détruite plus tard par les Sarrasins.

Viennent ensuite les heures obscures du haut Moyen Age et il faudra attendre l'arrivée des bénédictins pour retrouver des documents sûrs et des signes de prospérité. Ce sont ces moines qui introduisent la culture des arbres fruitiers, et celle du pommier, devenue spécificité toute viganaise. A cette époque, Pons, comte de Toulouse qui a commis quelques mauvaises actions, désire le salut de son âme et, pour cela, il fait don du Vigan à l'abbaye Saint Victor de Marseille.

Nous sommes en 1053. Le prieuré Saint Pierre du Vigan est ainsi fondé et quelques paysans viennent bâtir leur maison tout autour. La source d'Isis fait à son tour l'objet d'un don et un aqueduc est construit. La prospérité est en marche ! Au début du XIIIème siècle, le pont sur l'Arre sera construit, le bourg aura son hospice et ses remparts.

01/02/2009

LES GENTILSHOMMES VERRIERS (3)

causse hortus.jpgLa production des verriers de l'Hortus au Moyen Age était une vaisselle luxueuse de grande qualité et d'une incroyable finesse : les coupelles, burettes, fioles, verres à tige ou gobelets découverts lors de fouilles locales ou dans les villes voisines montrent la variété et l'art accompli de ces maîtres verriers. Cette production était écoulée vers les grandes villes de la région, en particulier Montpellier où divers corps de métiers comme les distillateurs ou les apothicaires étaient de grands consommateurs de fioles. De même, les parfumeurs de la capitale languedocienne achetaient des flacons en quantité pour vendre leur fameuse Eau de la Reine de Hongrie. L'époque moderne est une alternance de périodes de difficultés et de périodes fastes pour l'industrie verrière. Les gentilshommes verriers, sensibles aux idées de la Réforme participent même à leur propagation en tenant souvent le rôle de prédicateur. Au début du 18ème siècle, ils furent durement touchés, à la fois par les répressions engagées par le pouvoir royal, mais aussi par la guerre des Camisards. C'est dans ce contexte de guerre civile que Beaumes fut partiellement détruite. Déjà au cours du 17 ème siècle, elles connurent de nouveaux soucis qui signèrent leur déclin au siècle suivant. En effet, Colbert alerté par la diminution du patrimoine forestier du royaume édicte un décret qui limite et réglemente l'utilisation des bois. Malgré plusieurs tentatives, l'application de ces lois reste lettre morte, car au 18 ème siècle grâce à une conjoncture économique favorable la production verrière de l'Hortus augmente. Pourtant, les décrets de 1723 puis de 1742 intiment l'ordre aux gentilshommes de déplacer leurs ateliers vers les montagnes plus boisées de l'Aigoual. Un véritable lobby, composé des verriers, des représentants de leur corporation et des grands propriétaires fonciers comme le Marquis de Roquefeuille ou le Marquis de la Fare, tente de s'opposer aux décisions du pouvoir central. Finalement, à la veille de la Révolution, Messieurs les verriers quittent le Causse pour ouvrir de nouveaux ateliers sur la montagne de la Séranne et dans la vallée de la Buèges où les forêts contiennent de grandes quantités de bois propres à leur art. Pourtant, ce déplacement marque la fin des verreries forestières qui ne se rélèvent pas des difficultés liées à l'enclavement de ces nouveaux sites et l'essor des verreries à charbon de terre leur donnent bientôt le coup de grâce.

25/01/2009

LES GENTILSHOMMES VERRIERS (2)

verriers.jpgLe verre est obtenu par la fusion de 3 éléments : de la silice à 60 %, de la soude et de la chaux qui empêche la porosité du verre et qui lui donne du brillant. Des oxydes minéraux sont incorporés à la pâte pour obtenir des verres colorés : du fer pour la couleur verte, du cobalt pour le bleu, du manganèse pour le violet, du cuivre pour le rouge et de l'uranium pour le jaune. La présence d'oxyde de fer dans le sol du causse a donné son nom au village de Ferrières. Ce toponyme, fréquemment associé aux verreries, montre que l'implantation d'ateliers verriers était liée pour partie aux ressources locales. Pourtant, les pigments d'uranium et surtout de cobalt étaient importés de fort loin et étaient donc très onéreux.

Hormis la chaux qui est facilement obtenue à partir de la combustion du calcaire environnant, ni la silice ni la soude ne se trouvent dans le milieu naturel du Causse de l'Hortus. Il fallait donc faire venir ces composants à dos de mulets des régions avoisinantes. La silice était obtenue à partir de galets de quartz que l'on ramassaient dans les lits du Gardon mais surtout de l'Hérault distant d'une dizaine de kilomètres. Pour en extraire la silice, les galets étaient "étonnés", c'est à dire cuits à haute température puis plongés dans l'eau. La soude provenait de plantes sauvages poussant sur le littoral. La combustion de la salicorne et les diverses espèces de soude formaient une "brique" qui était généralement transportée par les marchands de verres lorsqu'ils venaient chercher leur livraison à la verrerie.

 Avant le raffinage et le soufflage du verre, il était nécessaire d'effectuer une première fusion de la pâte dans un four spécial appelé "carcaise". Cette pâte, la fritte, était ensuite concassée puis mise à recuire dans des creusets jusqu'à 1 400 ° C.

Les maîtres souffleurs, aidés de "gamins", prélevaient dans les creusets une petite quantité de verre en fusion à l'aide de longues cannes et soufflaient une paraison après l'avoir égalisée sur une pierre plate faisant office de marbre. A la forme soufflée sont rajoutés des anses, pieds, bec verseur ainsi que des éléments décoratifs comme des gouttes, des filaments, des résilles qui constituent l'objet fini. Immédiatement après leur réalisation, les objets sont mis dans un four de recuissons où ils vont progressivement s'abaisser en température.